Recommandations de l’Anses vis-à-vis des nanomatériaux dans l’alimentation

La présence de nanomatériaux dans les produits alimentaires s’est considérablement renforcée depuis une vingtaine d’années. En conséquence, les travaux et réflexions sur leurs risques mais aussi sur la réglementation de leur emploi se sont développés et multipliés. L’Anses synthétise ici les résultats de ses propres travaux sur les nanomatériaux. Notamment, elle fait le point sur les connaissances à propos de leurs usages et fournit ses propres recommandations pour l’évaluation de leurs risques sanitaires. Elle suggère entre autres de développer l’exhaustivité des données disponibles et de travailler sur une méthodologie d’évaluation appropriée aux nanomatériaux.

Consultez l’article de l’Anses sur https://www.anses.fr/fr/content/nanomat%C3%A9riaux-dans-l%E2%80%99alimentation-les-recommandations-de-l%E2%80%99anses-pour-am%C3%A9liorer-leur. Plus plus d’informations sur les recommandations de l’Anses vis-à-vis des nanomatériaux, vous pouvez également consulter le rapport complet sur https://www.anses.fr/fr/system/files/ERCA2016SA0226Ra.pdf

Génotoxicité et risque de cancer liés au tabagisme dit de « troisième main »

Le tabagisme dit de « troisième main », c’est-à-dire l’exposition aux résidus de fumée subsistant dans l’environnement après la consommation de tabac, est une problématique de santé publique méconnue et sous-estimée. Le tabagisme passif est aujourd’hui bien documenté et son influence sur la survenue de maladies comme le cancer du poumon a été clairement démontrée. Le tabagisme de « troisième main », en revanche, ne fait l’objet d’une attention particulière que depuis peu. Ses liens avec le cancer ou d’autres maladies chroniques sont méconnus, faute d’études suffisantes à ce propos. Pourtant, des preuves témoignent de la forte présence des résidus de fumée dans les environnements intérieurs. Il est donc important de déterminer les risques associés.

Cet article scientifique synthétise les études existantes sur les risques liés au tabagisme de «  troisième main », qui mettent notamment en avant la génotoxicité et le caractère cancérigène des résidus de tabac subsistant dans l’environnement. L’article illustre ainsi l’avancée des recherches sur ce sujet. Les chercheurs précisent que les études actuelles comportent des limites. Notamment, les personnes sujettes au tabagisme de « troisième main » sont généralement aussi exposées au tabagisme passif et à de nombreux autres polluants environnementaux. Il est donc pour l’heure difficile de déterminer exactement les influences spécifiques du tabagisme de « troisième main » sur la santé, et d’autres études sont ainsi à mener sur ce sujet.

 

Références : Hang B., Wang P., Zhao Y. et al, 2019 : Thirdhand smoke: Genotoxicity and carcinogenic potential. [En ligne] Chronic Diseases and Translational Medicine, 8 p. Disponible en libre-accès sur https://doi.org/10.1016/j.cdtm.2019.08.002

Appel à une restriction des PFAS dans le cadre du règlement REACH

Les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS), une famille comprenant plus de 4000 substances chimiques, sont très largement utilisées dans l’industrie, et ce dans de nombreux produits. L’être humain peut être exposé aux PFAS par divers biais, dont l’alimentation, l’eau ou encore les objets.

Ces substances présentent non seulement des risques environnementaux mais également des risques sanitaires. Plusieurs PFAS sont ainsi reconnus comme étant reprotoxiques, susceptibles d’affecter le développement du fœtus ou encore cancérogènes. D’autres sont suspectés d’être des perturbateurs endocriniens. De plus, leur dégradation est très lente : ces substances persistent ainsi très longtemps dans l’environnement mais aussi dans l’organisme.

Dans ce contexte, les autorités allemandes, néerlandaises, norvégiennes, suédoises et danoises appellent à une restriction de leur usage via le réglement REACh. Une consultation publique a été lancée pour recueillir en priorité les témoignages des entreprises qui fabriquent, utilisent ou vendent des produits contenant des PFAS. La participation des scientifiques et des ONG est également vivement encouragée afin de recueillir des données objectives.

Les informations collectées grâce à la consultation publique seront utilisées pour préparer la proposition de restriction de l’usage des PFAS. Celle-ci sera soumise à l’European Chemicals Agency (ECHA), l’organisme responsable du réglement REACh.

Plus d’informations sur https://echa.europa.eu/fr/-/five-european-states-call-for-evidence-on-broad-pfas-restriction

Fiche pratique « L’étiquetage de vos produits cosmétiques », par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

La DGCCRF rappelle en premier lieu que les mentions figurant sur l’étiquette des produits sont définies par la réglementation européenne relative aux produits cosmétiques (Règlement (CE) n° 1223/2009 du 30 novembre 2009), et énumère les informations qui doivent obligatoirement être précisées :
-un contact (nom et adresse) pour signaler tout problème ou effet indésirable lié au produit
-le pays de fabrication (si hors UE)
-le poids/le volume
-les précautions d’emploi
-une ou plusieurs dates (date limite d’utilisation, durée de conservation post ouverture…). La DGCCRF rappelle les symboles de ces différentes dates.

La DGCCRF rappelle ensuite les obligations concernant l’ordre d’affichage et la dénomination des ingrédients, et donne plusieurs explications utiles pour une bonne lecture des étiquettes. Notamment, elle définit et explique les notions qui peuvent être présentes sur les étiquettes.

La fiche pratique revient finalement sur la notion d’allégation. En tant que consommateur, il est possible de rencontrer des allégations mensongères, qui laissent supposer une meilleure qualité des produits alors qu’elles relèvent en réalité uniquement d’une obligation légale. Par exemple, certains fabricants européens mentionnent sur les étiquettes que le produit n’a pas été testé sur les animaux, alors que cela est simplement interdit pour les produits européens. D’autres mettent en avant que le produit ne contient pas une substance qui est en réalité interdite par la réglementation.

La DGCCRF présente également plusieurs allégations trompeuses, comme « sans perturbateur endocrinien » alors que pour l’heure toutes les substances de ce type n’ont pas encore été définies. La DGCCRF cite pour finir plusieurs allégations autorisées, tout en rappelant que seule la liste des ingrédients peut véritablement attester de la qualité ou de la sûreté du produit.

Consultez et téléchargez la fiche pratique sur https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/Publications/Vie-pratique/Fiches-pratiques/letiquetage-de-vos-produits-cosmetiques 

Biosurveillance de la présence de bisphénol A, de bisphénol S et de métabolites de phtalates dans l’organisme de femmes enceintes

Les phtalates et le bisphénol A sont des substances entrant couramment dans la composition des produits. Or, les recherches scientifiques menées à leur propos ont progressivement démontré leurs effets sanitaires néfastes, tout particulièrement sur le système endocrinien. Suite à ces recherches, une tendance à remplacer le bisphénol A par d’autres susbtances s’est développée. Les industriels se sont notamment tournés vers le bisphénol S et le bisphénol F.

Or, d’autres recherches laissent aujourd’hui supposer que ces alternatives ne sont pas sans danger pour la santé, et qu’elles pourraient également impacter le fonctionnement du système endocrinien. Elles seraient de plus susceptibles de particulièrement s’accumuler dans l’organisme. L’European Chemicals Agency (ECHA) a d’ailleurs publié l’année dernière une étude qui a montré que la biopersistance du bisphénol S serait plus élevée que celle du bisphénol A.

Dans la présente étude, les auteurs ont procédé à la biosurveillance de la présence de bisphénol A, de bisphénol S et de métabolites de phtalates chez 100 femmes enceintes en Crête. Pour réaliser cette biosurveillance, les chercheurs ont analysé la présence de bisphénols S et A ainsi que celle de métabolites de phtalates dans des échantillons de cheveux des participantes à l’étude.

Les chercheurs ont observé la présence de monoethylhexyl phthalate, un métabolite de phtalate, dans près de 70% des échantillons. Deux autres métabolites de phtalates, à savoir le mono isobutyl phthalate et le mono-n-butyl phthalate (deux autres métabolites), ont été respectivement détectés dans 40% et 28% des échantillons. Le bisphénol A et le bisphénol S étaient quant à eux respectivement présents dans 37% et 34% des échantillons.

Grâce à un questionnaire communiqué aux participantes à l’étude, les auteurs ont pu discerner des facteurs susceptibles de favoriser la présence de métabolites de phtalates dans l’organisme. Ils estiment ainsi une forte corrélation entre l’utilisation de récipients alimentaires en plastique ainsi que l’emploi de cosmétiques avant et pendant la grossesse et la présence de plusieurs métabolites de phtalates dans l’organisme.

Les auteurs ont d’ailleurs remarqué que selon le type de cosmétiques et la période d’utilisation, les métabolites de phtalates retrouvés dans l’organisme et leurs concentrations varient. Ils ont ainsi noté que l’emploi de certains cosmétiques (laque pour cheveux, maquillage, déodorant) avant ou pendant le premier trimestre de grossesse semblait particulièrement favoriser l’accumulation de plusieurs métabolites de phtalates dans l’organisme. Ils nuancent néanmoins ces informations par le fait que les données ont été obtenues à l’aide d’un questionnaire, et que leur véracité ne peut donc pas être assurée.

Pour finir, les chercheurs ont estimé les risques sanitaires liés à la présence de ces substances chimique dans l’organisme des participantes. Ils ont notamment distingué une forte corrélation entre les concentrations en monoethylhexyl phthalate et l’insuffisance pondérale à la naissance. La présence de bisphénol S a quant à elle été associée à une augmentation du poids et de l’indice de masse corporelle (IMC). La présence d’autres facteurs d’influence possibles n’a pas permis de confirmer l’association entre des effets sanitaires particuliers et les concentrations de bisphénols A détectées dans les cheveux des participantes.

 


Références : Katsikantami I., Tzatzarakis M. N., Karzi V. et al., 2020 : Biomonitoring of bisphenols A and S and phthalate metabolites in hair from pregnant women in Crete. [En ligne]. Science of The Total Environment, vol. 212. Disponible sur https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0048969719356463?via%3Dihub

L’ANSES demande la reconnaissance du résorcinol comme substance extrêmement préoccupante

Le résorcinol est une substance utilisée dans des produits variés : pneus, caoutchouc, colles, résines industrielles, mais aussi dans certains produits cosmétiques (colorations capillaires et mascaras) ainsi que dans certains produits alimentaires (par exemple les crevettes).

Dans le cadre de la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, l’Anses a étudié un ensemble de substances susceptibles d’affecter le système endocrinien, dont le résorcinol. Les travaux de l’Anses ont permis de caractériser les effets négatifs de cette substance sur le système endocrinien et plus particulièrement sur la fonction thyroïdienne, notamment chez la femme enceinte.

Suite à son expertise, l’Agence a estimé que le résorcinol remplissait tous les critères pour être identifié en tant que perturbateur endocrinien selon les critères de l’OMS mais également selon les recommandations de 2013 de la Commission européenne. Dans ce contexte, l’Anses a déposé un dossier pour faire reconnaître le résorcinol en tant que perturbateur endocrinien par l’ECHA. Si le dossier est accepté, le résorcinol intégrera la liste des substances soumises à autorisation par le règlement REACh. La présence de résorcinol dans les produits à raison de plus de 0,1% de la composition devra alors notamment être impérativement notifiée par le producteur.

Le dossier déposé par l’Anses est en consultation publique jusqu’au 17 avril : https://echa.europa.eu/documents/10162/53d2eb0e-b0e8-fabb-b4b0-a56c246cb0a3

Consultez l’avis de l’Anses sur https://www.anses.fr/fr/system/files/REACH2018SA0110.pdf

Risques sanitaires liés à l’utilisation de vaisselle en bambou

Préférée à la vaisselle en plastique pour son caractère plus naturel et donc plus écologique, la vaisselle en bambou peut présenter des risques pour la santé. Plusieurs articles ont en effet été rappelés en raison d’une migration de leurs composants vers les aliments.

Le liant couramment utilisé, une résine plastique de mélamine-formaldéhyde, est notamment en cause. Il peut en effet migrer vers la nourriture lorsqu’il est de qualité insuffisante. Or, la mélamine peut être toxique pour les reins, et le formaldéhyde est une substance cancérogène reconnue. La part des ustensiles en bambou concernés par ce risque de migration vers la nourriture est loin d’être épisodique. Le risque serait effectivement présent pour un objet sur dix. De plus, le taux de migration des composants chimiques vers les aliments peut considérablement varier selon les exemplaires d’un même article. Ces variations s’expliquent notamment en raison d’un processus de fabrication insuffisamment maîtrisé.

En raison de ce taux de migration variable, il est difficile d’évaluer les risques des articles en bambou de manière précise et fiable. L’article souligne d’autre part que la réglementation encadrant l’utilisation du bambou est pour le moment encore très floue. Ce point doit d’autant plus inciter le consommateur à la plus grande vigilance vis-à-vis des objets fabriqués à partir de ce matériau. En attendant, il est préférable de privilégier les récipients tels que le verre ou l’acier inoxydable.

Retrouvez l’article de 60 Millions de Consommateurs en cliquant ici.

Compte-rendu de la la table ronde sur les perturbateurs endocriniens du 22 janvier 2020

Avec l’augmentation du nombre de patients atteints de maladies chroniques ou d’autres pathologies non transmissibles comme par exemple la baisse de la fertilité, que l’on associe en partie aux perturbateurs endocriniens, il est aujourd’hui primordial de développer une stratégie adaptée vis-à-vis de ces substances. Le 22 janvier 2020 a eu lieu une table ronde sur la thématique des perturbateurs endocriniens organisée par la Commission de l’Aménagement et du Développement Durable du Sénat. Cette table ronde a rassemblé de nombreux professionnels. Plusieurs points ont été traités et débattus.

L’importance d’une définition transversale officielle des perturbateurs endocriniens dans toutes les réglementations, y compris les réglementations sectorielles, a été rappelée. Effectivement, ces substances peuvent être rencontrées au quotidien dans des produits très variés. Désormais, il reste notamment à intégrer la définition de ces substances dans les secteurs des produits cosmétiques, des jouets et des contenants alimentaires. En effet, la réglementation en vigueur pour les cosmétiques n’inclut actuellement pas de dispositions spécifiques à l’égard des perturbateurs endocriniens et notamment de leur évaluation. Cependant, lors de la table ronde, la Fédération des entreprises de la beauté (Febea) a rappelé que les effets sanitaires des substances sont directement évalués1, et ce avant leur emploi. Cette évaluation inclut donc entre autres le contrôle de l’action endocrine des substances.

Il en est de même pour les emballages en plastique, dont les produits sont évalués de manière anticipée, avant leur mise sur le marché, afin de certifier l’absence de risques sanitaires. La Fédération des fabricants d’emballages en plastiques s’exprime d’ailleurs favorablement à une réglementation plus stricte, qui permettrait une meilleure évaluation et une meilleure gestion des risques. En effet, pour ces professionnels, une telle réglementation permettrait de « rassurer » le consommateur, en lui assurant que le produit qui lui est proposé est réellement sans risque de perturbation du système endocrinien. La Febea est du même avis, estimant qu’il n’est pas envisageable de commercialiser des produits « a demi sûrs ».

La Commission de l’Aménagement et du Développement Durable a alerté sur le fait que la réglementation n’était pour l’heure pas assez contraignante. La réglementation REACh a permis jusqu’à maintenant de recenser 53 000 substances chimiques, dont la plupart n’ont pas été évaluées, et ne sont pas près de l’être. Seules 250 substances sont soumises à autorisation. Au final, le règlement REACh n’encadre réellement que 16 perturbateurs endocriniens. Seuls deux perturbateurs endocriniens sont signalés en ce qui concerne les biocides, et pour les cosmétiques, seul un appel à information a été réalisé pour le moment. En France, seules 7 substances sont reconnues officiellement comme des perturbateurs endocriniens. Or, des milliers de produits potentiellement perturbateurs endocriniens sont présents sur le marché. Face à cette situation, la Commission de l’Aménagement et du Développement Durable a soulevé une question cruciale : quel axe privilégier pour l’action ? L’information des consommateurs, qui orientera leurs choix et par là modifiera la demande en faveur de produits moins nocifs et donc incitera les producteurs à reconsidérer les substances qu’ils utilisent ? Ou la mise en place d’une réglementation plus stricte, portée par les institutions, qui permettra une évolution à la source ?

Pour André Cicollela, président du Réseau Environnement Santé, il y a aujourd’hui deux grands enjeux autour des perturbateurs endocriniens. Le premier est de favoriser l’information et l’appropriation de l’information par les particuliers, afin de les rendre plus autonomes face aux polluants chimiques grâce à un choix réellement éclairé. Le deuxième enjeu est que la problématique des perturbateurs endocriniens soit aussi portée par les institutions, et de repenser le rôle de celles-ci pour mieux préserver la santé des individus. La Charte « Villes & Territoires sans perturbateurs endocriniens », qui a déjà plusieurs signataires, est un exemple d’implication des institutions.

En France, la deuxième stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens 2019-2022 prévoie que l’ANSES dresse d’ici fin 2021 une liste de ces substances. Il s’agira de déterminer les perturbateurs endocriniens avérés mais aussi suspectés ou probables. Dans ce cadre, l’ANSES s’est engagée à travailler sur 6 à 10 substances par an. Lors de la table ronde, l’ANSES a expliqué que cette évaluation des risques se fera grâce à des données de laboratoire mais aussi par des données issues des fabricants. Ce travail de l’ANSES permettra d’obtenir des données qui favoriseront un meilleur encadrement des perturbateurs endocriniens au niveau national mais aussi au niveau européen, ces données étant destinées à être communiquées aux instances européennes. Elles permettront par exemple de mettre à jour la liste des perturbateurs endocriniens encadrés par le règlement REACh.

Lors de la table ronde, il a été souligné le fait que parmi les substances signalées ces dernières années comme étant des perturbateurs endocriniens avérés, beaucoup d’entre elles étaient déjà connues pour d’autres effets sur la santé (leur cancéroginicité par exemple). Pour les perturbateurs endocriniens suspectés ou probables, il a été suggéré de préciser dans le classement qu’il existe un doute quant aux risques concrets de ces substances. Cependant, cela revient à laisser au public, en connaissance du risque potentiel, le choix d’utiliser ou non la substance ou un produit qui la contient. Il y a donc un risque sanitaire, dans le cas où la substance serait bien un perturbateur endocrinien.

Dans ce contexte, il a été suggéré que ce soit de la responsabilité des agences sanitaires de trancher sur le caractère ou non de perturbateur endocrinien de ces substances. Le problème qui se pose alors est le manque d’outil de diagnostic pour statuer sur les perturbateurs endocriniens probables ou suspectés. Le Sénat a pointé, dans le même ordre d’idée, l’inadéquation des méthodes habituelles de toxicologie avec l’évaluation des perturbateurs endocriniens, en raison de leurs propriétés spécifiques. En effet, la toxicologie se base généralement sur une relation dose-effet monotone, c’est-à-dire que plus la dose est élevée plus les effets seront conséquents. Or, les effets des perturbateurs endocriniens ne sont pas nécessairement non-monotones. Une faible dose peut ainsi avoir plus d’effets qu’une dose plus importante.

Autre difficulté, les « effets cocktails » que semblent avoir plusieurs de ces substances. En effet, une faible dose d’une substance peut ne pas avoir d’effet seul. Mais cette dose peut être suffisante pour générer des effets sanitaires négatifs en cas d’association avec une autre substance. D’autre part, les recherches scientifiques menées ont permis de constater les effets transgénérationnels des perturbateurs endocriniens. Cela signifie qu’ils peuvent avoir des effets sur les générations suivantes. La Commission a ainsi rappelé que non seulement l’évaluation mais également les normes devraient tenir compte de ces effets.

La Commission a également souligné un autre frein : le fait que le processus d’évaluation et de catégorisation des perturbateurs endocriniens est actuellement très (trop) long pour être suffisamment efficace. Il est aussi compliqué, en raison, comme l’a souligné l’Anses, de données insuffisantes. C’est ce manque de données qui empêche de classer les substances comme perturbateurs endocriniens avérés, en devant se limiter à les évaluer comme perturbateurs endocriniens suspectés ou probables. Un axe d’évolution serait de procéder à une évaluation par famille de substances (ex : tous les bisphénols), et non substance par substance. En effet, on peut suspecter des effets sanitaires similaires pour les substances issues d’une même molécule. Dans ce même cadre, la Commission de l’Aménagement et du Développement Durable recommande pour l’heure de rester vigilant vis-à-vis des substances alternatives. On peut ici prendre l’exemple du bisphénol B, alternative au bisphénol A, donc les effets sanitaires négatifs commencent à être révélés. D’autre part, une autre piste a été régulièrement suggérée lors de la table ronde : celle d’intégrer pleinement un large panel de données (données indépendantes, données fournies par les metteurs en marché, données des industriels…) dans le processus d’évaluation, afin de rendre celui-ci plus efficace et pertinent.

Lors de cette table ronde, les applications d’analyse des produits ont également été traitées. De plus en plus populaires auprès des consommateurs, elles orientent de manière croissante leurs choix. Mais dans quelle mesure sont-elles pertinentes ? Pour la Febea, ces applications ont leurs limites. Tout d’abord, elles fonctionnent en scannant le code barre des produits. Or, a formulation des cosmétiques change très souvent, mais le code barre reste alors le même. Ainsi, le consommateur peut ainsi ne pas trouver exactement le bon produit sur l’application, en raison d’un changement de formulation. Par exemple, s’il n’y a pas eu de mise à jour sur l’application, celle-ci peut donc identifier un produit comme étant à éviter alors que la ou les substances à éviter ont été retirées. Inversement, elle peut identifier un produit comme étant sain alors qu’une substance nocive a été récemment ajoutée.

D’autre part, la Febea explique que les données sont souvent erronées sur certaines applications, car elles reposent sur la saisie par le consommateur. Il peut donc y avoir des erreurs. Dernier problème : selon l’application, un produit peut être évalué différemment, et les règles d’évaluation ne sont pas transparentes. Ainsi, il arrive que tous les produits d’une même catégorie soient notés comme nocifs, alors que certains produits de cette catégorie ne le sont pas concrètement. C’est par exemple le cas des filtres solaires sur l’une des applications les plus connues, alors que ces produits sont cruciaux pour se protéger des UV.

L’initiative AskREACh, mise en place par la Commission Européenne, permet de recenser les substances présentes dans les produits. L’objectif est de faciliter l’information du consommateur, en lui permettant grâce à des outils informatiques de connaître la présence d’une substance extrêmement préoccupante dans un produit. AskREACh vise aussi à sensibiliser les distributeurs à la présence de substances nocives dans les produits qu’ils commercialisent. Le problème qui se pose est la détection des substances dans les produits. Dans l’idéal, il faudrait que les industriels puissent attester qu’il y a moins de 0,1% des substances identifiées comme extrêmement préoccupantes dans les produits. Au-delà de cette concentration, il est obligatoire, selon l’article 33 de REACh, de communiquer l’information au consommateur. Cette analyse est difficile à réaliser correctement compte tenu du grand nombre de substances extrêmement préoccupantes dont la présence est à contrôler. De plus, certains intervenants ont ciblé le manque de sensibilité de certains des tests actuels, ce qui rend compliqué le fait d’attester ou non de l’absence d’une substance.

Les intervenants et sénateurs sont également revenus sur les perspectives au niveau européen. La Commission Européenne a lancé deux consultations, l’une à destination des citoyens et l’autre à destination des parties prenantes. Elles permettront de préciser les actions à mettre en place pour les prochaines années. Par ailleurs, une stratégie concrète vis-à-vis des perturbateurs endocriniens est attendue pour le deuxième semestre 2020. Enfin, il est prévu que d’ici juin 2020 une définition transversale des perturbateurs endocriniens au niveau européen et une catégorisation plus aboutie de ces substances soient proposées. C’est également d’ici juin 2020 que la Commission Européenne a promis de proposer une stratégie globale sur les substances chimiques. Un volet perturbateurs endocriniens est attendu : il appartient aux états européens de faire valoir l’importance de ce volet auprès de la Commission Européenne. Les travaux de l’Anses seront un premier pas pour signaler les perturbateurs endocriniens et encourager l’action au niveau européen.

Retrouvez la table ronde en vidéo : http://videos.senat.fr/video.1492996_5e263753e3357.exposition-du-quotidien-aux-perturbateurs-endocriniens—table-ronde?timecode=10440


 

Mise en ligne du site « Agir pour bébé »

Santé Publique France, agence nationale de santé publique, a pour mission d’améliorer et de protéger la santé des populations. C’est dans ce cadre que l’agence vient de mettre en ligne son site internet Agir pour bébé.  Ce site institutionnel donne des clés aux futurs et jeunes parents, pour créer un environnement favorable au développement de bébé, avec des conseils pratiques et informations scientifiquement validées. Il s’adresse aux futurs parents (la future mère et le futur père ou le/la co-parent(e)) ainsi qu’aux parents de nouveau-nés de moins de 4 mois. Il s’adressera à une cible plus large dans une prochaine version (parents d’enfants de 0 à 2 ans). L’objectif du site Agir pour bébé est d’informer les futurs parents et parents de nouveau-nés sur l’influence pendant la grossesse et la petite enfance des environnements (chimiques, physiques, sociaux, affectifs etc.) sur leur santé et celle de leur enfant.

Concentrations intérieures en COSV, voies d’exposition et impact sur la santé des enfants

Au cours du développement, la santé des enfants peut facilement être affectée par les substances toxiques présentes dans leur environnement, comme les composés organiques semi-volatils (COSV) : les phtalates, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les polybromodiphényléthers (PBDE), et les éthers d’organophosphorés (OPE). La présence de certains éléments dans l’environnement des enfants, comme les produits plastiques, peut entraîner une augmentation des concentrations de ces polluants.

Dans la présente étude, 68 échantillons d’air, de poussière et de films pour fenêtre ont été collectés dans des logements où vivaient des enfants âgés de 3 à 6 mois, avec pour objectif d’analyser les concentrations intérieures en phtalates, HAP, PBDE et OPE. Les résultats ont montré des concentrations particulièrement élevées, ainsi que des corrélations entre ces valeurs et les méthodes de cuissons employées, la consommation de tabac, la réalisation de travaux de décoration récents ou encore les revêtements des sols.

Les principales voies d’exposition des enfants aux polluants étudiés sont selon cette étude l’ingestion et la voie cutanée pour les phtalates et les éthers d’organophosphorés, et l’ingestion et l’inhalation pour les HAP et les PBDE. De manière globale, le risque cancérigène associé aux COSV était supérieur au risque acceptable en raison des concentrations relevées, tout particulièrement en ce qui concerne l’exposition par ingestion ou par voie cutanée. Ces résultats suggèrent donc que les concentrations en intérieures en COSV auxquelles sont exposés les enfants présentent un risque notable pour leur santé.

Retrouvez l’article complet en cliquant ici.

Références : Li H. L., Liu L. Y., Zhang Z. F., Ma W. L., Sverko E., Zhang Z., Song W. W., Sun Y., Li Y. F. Semi-volatile organic compounds in infant homes: Levels, influence factors, partitioning, and implications for human exposure. Environmental Pollution, 2019, vol. 251, p. 609-618.