Impact du tabagisme maternel sur les pathologies respiratoires de l’enfant

En 2021, près d’une mère sur quatre fumait lorsqu’elle a appris sa grossesse d’après le baromètre de Santé Publique France. Environ 13% des femmes continueront de fumer tout au long de la grossesse. Les conséquences sur la santé respiratoire de l’enfant à naître sont bien établies. Du fait de son passage à travers la barrière placentaire, la nicotine est le principal facteur provoquant des atteintes au développement pulmonaire de l’enfant.

Tout d’abord, il y a un lien connu entre exposition au tabac in utero et prématurité. En effet, le tabac pendant la grossesse augmente de 25% la prématurité. Par ailleurs, les enfants nés de mères fumeuses pendant la grossesse ont également plus de risques de développer des infections respiratoires. Il y a ainsi un risque accru pour le nourrisson de développer une pneumopathie ou des bronchites aigues.

L’exposition tabagique in utero et environnementale augmente aussi le risque d’asthme chez les jeunes enfants et les adolescents. A noter que le sevrage tabagique en début de grossesse reste associé à un risque d’asthme chez l’enfant à l’âge de 3 ans. Ce risque augmente avec la quantité de cigarettes consommées par la mère lors du premier trimestre. Lorsque les parents fument à l’intérieur du logement, l’enfant a plus de risques de devenir asthmatique. Il est important de souligner que le tabagisme paternel constitue également un facteur de risque d’asthme pour l’enfant. De plus, le tabagisme maternel actif et passif augmente le risque pour l’enfant de développer des allergies respiratoires.

L’usage de la cigarette électronique s’est répandu ces dernières années. A date, il existe peu d’études sur le sujet. Toutefois, il semble que la consommation de cigarette électronique pendant la grossesse entraine des anomalies structurelles chez le fœtus avec un impact sur le développement du poumon.

Au regard des résultats des études, la prévention sur le tabac auprès des futurs parents est primordiale. L’objectif doit être de limiter au maximum l’exposition du fœtus au tabagisme parental. Un arrêt du tabac pour les 2 parents dès le projet de grossesse serait idéal pour favoriser une bonne santé respiratoire du futur enfant.

Références :

Baromètre de Santé Publique France 2021, Consommation d’alcool et tabac pendant la grossesse, 2024

Petat H, Mazenq J, Impact du tabagisme au cours de la grossesse sur les pathologies respiratoires de l’enfant, Pathologie respiratoire et grossesse, 2024

Découvrez l’échange éclairé entre Mélie Rousseau, coordinatrice du projet FEES et Guillaume Karr

Mélie Rousseau, coordinatrice nationale du projet FEES Femmes Enceintes Environnement et Santé et responsable du Pôle Périnatalité à l’APPA, a été interviewée par Guillaume Karr, ingénieur-expert en santé environnementale, pour le blog « Santé des enfants et environnement ».

Mélie et Guillaume abordent différents sujets, de l’air intérieur, en passant par l’alimentation et les cosmétiques, sans oublier la coparentalité et les pièges du marketing spécial bébé. Dans cette interview, des conseils et astuces seront présentés afin d’aider les futurs et jeunes parents à adopter les bons gestes pour réduire l’exposition aux polluants environnementaux.

Ce temps d’échange montre l’importance grandissante de tendre vers une « sobriété des expositions chimiques » et cela passe par les parents.
Découvrez et partagez cet échange riche en conseils et bonnes pratiques pour les futurs et jeunes parents juste ici :

Analyse et comparaison des concentrations en phénols durant la grossesse et durant la première année de vie de l’enfant

La présence de parabènes, de bisphénol A et de triclosan est aujourd’hui très réglementée, en Europe dont la  France. Cependant, depuis que ces restrictions d’usage ont été mises en place, les données de biosurveillance sont très peu nombreuses en France. Il est ainsi difficile d’estimer l’exposition des personnes, et notamment des individus plus fragiles comme les enfants, ce qui pourtant permettrait la mise en place d’actions de prévention adaptées.

Dans ce contexte, les auteurs de cette étude ont étudié la présence de phénols dans l’organisme de 479 femmes enceintes et 150 de leurs enfants. Tous les participants appartenaient à la cohorte française SEPAGES. Afin de réaliser leur étude, les chercheurs ont analysé des échantillons d’urine des participants à plusieurs stades. Chez les femmes enceintes, des échantillons ont été prélevés au cours du premier et du troisième trimestres de grossesse. Pour les nourrissons, les échantillons ont été prélevés à 2 et à 12 mois. Les chercheurs ont ensuite comparé les concentrations de plusieurs phénols entre les échantillons d’urine de la mère et de l’enfant. L’objectif était d’évaluer la corrélation entre l’exposition de la mère et celle de l’enfant au fil du temps.

Bien que les concentrations moyennes détectées soient par comparaison plus faibles que celles observées précédemment dans le cadre de la cohorte EDEN, plusieurs polluants chimiques ont été très fréquemment détectés dans les échantillons. Ainsi, en moyenne, 90% des échantillons contenaient du bisphénol A, de l’éthylparabène, du méthylparabène, du benzophénone-3 et du triclosan. En revanche, la présence de bisphénol AF, B et BF n’a été détectée que dans moins de 5% des échantillons.

Les auteurs ont d’autre part constaté que les concentrations en bisphénol A, bisphénol S, méthylparabène, éthylparabène et propylparabène chez l’enfant de 12 mois équivalaient, voire même dépassaient, celles présentes dans l’organisme de la mère durant la grossesse. Les auteurs soulignent qu’ils n’ont pas observé de corrélation significative entre les concentrations chez la mère et celles chez l’enfant : il semble donc toujours y avoir une forte exposition des enfants à ces polluants malgré les restrictions d’usage, qui entraîne une bioaccumulation progressive.

De plus, les chercheurs ont constaté que si les concentrations de la plupart des phénols étudiés diminuaient avec le temps chez les femmes enceintes, cela n’était pas le cas pour le benzophénone-3 et le bisphénol S. Ces deux polluants semblent donc particulièrement persister. La biopersistance du bisphénol S a d’ailleurs été mise en avant l’année dernière par une étude de l’European Chemicals Agency (EHA). De plus, les chercheurs n’ont pas observé de baisse des concentrations de phénols au fil du temps chez les enfants.

Les auteurs ont pu distinguer des corrélations entre le niveau d’étude des femmes et les concentrations de plusieurs phénols. Notamment, un plus faible niveau d’étude semble associé à de plus fortes concentrations de triclosan, d’éthylparabène et de propylparabène1. Il faut cependant noter que cette association n’a pas été observée pour les autres phénols. Ainsi, les auteurs n’ont pas pu déterminer de corrélation significative entre le niveau d’étude et les concentrations de bisphénol A ou S chez la femme.

En conclusion, cette étude permet de constater que malgré les restrictions d’usage mises en place, la présence de phénols dans l’organisme des participants reste très forte, que ce soit chez les femmes ou chez les enfants. Les concentrations élevées de ces polluants observées chez les enfants à 12 mois souligne qu’il faut s’intéresser davantage à leur biopersistance ainsi qu’à leur bioaccumulation au fil du temps.


Références : Rolland M., Lyon-Caen S., Sakhi A. K. et al, 2020 : Exposure to phenols during pregnancy and the first year of life in a new type of couple-child cohort relying on repeated urine biospecimens. [En ligne]. Environment International, vol. 139. Disponible en libre-accès sur https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0160412019340681?via%3Dihub.


1. Les corrélations entre le niveau d’étude et les concentrations de phénols dans l’organisme peuvent être expliquées par des habitudes de consommation différentes. Une enquête récemment menée par l’ARS Nouvelle Aquitaine illustre ce point. Celle-ci avait effectivement permis de constater que les femmes les moins diplômées avaient moins tendance à recourir à des produits labellisés. Vous pouvez consulter le résumé de cette enquête sur https://www.projetfees.fr/enquete-sante-environnement-interieur-comportements-et-risques-dexposition-aux-polluants-interieurs-ars-nouvelle-aquitaine/

La Commission Européenne demande un avis scientifique sur la présence de bisphénol A dans les vêtements

En avril, la présence de bisphénol A a été détectée dans des chaussettes pour enfant. Cette étude est la première à avoir examiné et montré la présence de bisphénols A dans des échantillons de vêtements commercialisés en Europe. En 2017 et 2018, du bisphénol A avait également été détecté dans des vêtements non commercialisés en Europe (à savoir dans des collants, vêtements qui peuvent être portés par les femmes enceintes, ainsi que dans des chaussettes pour enfant). Cette étude portant sur des échantillons de vêtements commercialisés en Espagne avait montré la présence de bisphénol A dans 90,6% d’entre eux, pour des concentrations allant de moins de 0,70 à 3736 ng/g.

Pour la Commission Européenne, la présence de cette substance chimique dans les vêtements pour enfant est tout particulièrement préoccupante en raison du contact prolongé des vêtements avec la peau. De plus, il existe pour les enfants un risque que les vêtements soient portés à la bouche, et que l’exposition au bisphénol A puisse ainsi également se faire par voie orale en plus de la voie cutanée.

Etant donné qu’il n’existe actuellement pas de réglementation sur les concentrations en bisphénol A dans les vêtements pour enfant, il est selon la Commission Européenne essentiel d’évaluer les risques associés à la présence de cette substance chimique, et les besoins de mise en place d’une législation appropriée.

La Commission Européenne demande ainsi à ce que :
-les données disponibles sur la présence de bisphénol A dans les vêtements soient examinées;
-de déterminer le seuil à partir duquel l’exposition au bisphénol A par les vêtements représente des risques concrets pour la santé;
-d’évaluer la vulnérabilité des femmes enceintes et des enfants à cette exposition au bisphénol A par les vêtements, et de déterminer les concentrations acceptables dans les vêtements qui leur sont destinés afin de limiter les risques pour leur santé.

La Commission escompte un avis final sur ce sujet d’ici l’été 2020.

Retrouvez le texte intégral ici.